L 'AMOUR QUE JE N'AI PAS DONNÉ
- Par Pierre-Jean BLAZY
- Le 19/12/2018
Et la pluie s'est installée, lente, patiente, infatigable, depuis le milieu de la journée jusqu'à la nuit d'encre noire.
Mais voici qu'une lumière s'allume, aux vitraux du château, comme des ombres qui bougent et bientôt les lumières jaunes et chaudes emplissent tout l'espace.
Il ne reste plus de place. La foule est au rendez-vous.
Devant la cheminée, à l'extrémité de la grande salle au parquet de bois, Jean-Michel Sananès entonne le chant de ses mots qui se faufilent entre les rangs serrés.
L'amour que je n'ai pas donné
je l'ai volé
(...)
Volé
A l'enfant de la rue que je n'ai pas entendu
A l'affamé que j'ai ignoré
A l'aveugle que je n'ai pas éclairé
A la haine que je n'ai pas éteinte
Au souffle de vie
que je n'ai pas honoré
C'est une soirée à trois voix. Jean-Michel Sananès est accompagné dans la déclamation de ses textes par
Ile Eniger et
Claude Artès.
Va petit homme
dans les cours d'école
où ne s'apprend plus le rêve
dans le cœur des hommes
ou l'on n'oublie l'amour
(...)
La vie est une béance plus grande que l'univers
je suis frère de l'herbe et du sang
A la guitare, Bruno Sananès enveloppe les mots et rythme les phrases, pour marier sonorités et mélodies.
Quand un poète prend sa retraite
il bâillonne ses mots
(...)
Quand un poète prend sa retraite
Une larme
acérée
plantée en travers du gosier
éteint les feux de son âme
quand un poète prend sa retraite
il se tire des silences en pleine tête
chaque nuit brule ses étoiles
Plus loin, toujours plus loin dans l'avancée de la nuit, la poésie voyage entre mer et montagnes, avec vos yeux pour miroir.
Va plus loin mon fils
quelle que soit ta taille
tu porteras la vie sur tes épaules
quelle que soit ta taille
ta dimension d'homme tu chercheras
(...)
Poète, viens
Aucune balle, jamais, ne tuera une idée
Il n'est pas de plus belle idée
que de vouloir aimer chacun
que de se savoir pareil à tous
Ainsi marche Jean-Michel Sananès.
Et dans ses pas vous vous êtes engouffrés, ami(e)s de la scène ouverte, où ce soir nous entendrons la cithare de Claire Patouillard, et un hommage au poète niçois trop tôt disparu Jean-Max Gallo.
Tour à tour les visages et les styles défilent devant vos mines réjouies ou émues:
Irène Leneuveu,
Bernard Féraud,
Philippe Martin,
Maryse Dutouya,
Lyanah,
Muriel Brosset,
Claire Patouillard (cythare et poème),
Luce Raynal,
Michel Orion,
David Cardoso,
Pierre Kozlowski dit Pierrot,
Cédric Jacob,
Jean-Max Gallo
(par les voix de Annie Montoya et Frédéric Altmann) ,
et
Patrice Alzina font résonner vivas et applaudissements nourris entre les murs épais du château.
Puis, c'est le temps du chant.
Et quel chant !
La sublime et envoutante voix de
Céline Delassalle nous emporte loin des rives du quotidien, pour un voyage à contre-nuit, dans quelques vallées du désir.
Au piano, le grand talent et le sourire charmeur d'Akil Djan
accompagnent la belle soprano, applaudie comme jamais.
Et maintenant, place au buffet soigneusement préparé, pour l'amour de l'amitié et du partage rendus possibles grâce à la poésie, la musique et le chant.
C'était une nuit où la pluie avait le goût de miel.
Pierre-Jean Blazy
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